L’érythrone d’Amérique
Si dans nos plates-bandes, les tulipes marquent l’arrivée du printemps, dans la forêt décidue laurentienne, ce sont les érythrones qui indiquent le changement de saison. Elles apparaissent tôt au printemps, peu après la fonte des neiges.
L’érythrone fait partie d’un groupe de plantes qu’on appelle les éphémères printanières. Ces plantes ont un taux de photosynthèse élevé, même à basses températures et, pour soutenir ce taux élevé, elles ont besoin d’un sol riche, d’un bon taux d’humidité et de beaucoup de lumière. Ce sont les conditions qu’on trouve dans nos sous-bois au printemps, avant la sortie des feuilles. L’érythrone, tout comme les autres éphémères, complète son cycle de vie aérien en quelques semaines, puis disparait.
L’érythrone est fréquente dans nos forêts, mais peu d’individus fleurissent. Elle forme souvent de larges massifs de feuilles tachetées parsemées ça et là de quelques fleurs. Durant leurs premières sept à huit années de vie, les érythrones ont une seule feuille et ne fleurissent pas. Les plantes plus matures qui fleurissent ont toujours deux feuilles qui s’ouvrent l’une après l’autre, la seconde libérant l’unique bourgeon floral. La fleur jaune à trois sépales et trois pétales s’ouvre au soleil, laissant voir ses étamines pourpres. Elle se referme le soir. L’érythrone peut vivre plus de 16 ans. Sa pérennité est assurée par un corme souterrain, organe de réserve analogue au bulbe des tulipes, profondément enfoui dans le sol (jusqu’à 15 cm).
L’érythrone se reproduit surtout de façon végétative par la formation de cormes satellites à partir de son corme lorsque celui-ci est bourré de réserves à la fin du printemps. Elle se reproduit aussi de façon sexuée, par ses fleurs. Le fruit est une capsule ovoïde contenant de quatre à sept graines munies d’un appendice charnu, la caroncule, très prisée des fourmis.
L’érythrone est un modèle d’économie de ressources. En effet, en plus d’emmagasiner rapidement et efficacement l’énergie solaire sous forme d’amidon dans son corme, elle utilise la translocation de ses ressources des feuilles vers le bulbe lorsque celles-ci fanent à la fin de sa période de croissance aérienne. Contrairement aux autres plantes dont les composants des feuilles se dégradent sur le sol, chez l’érythrone, ces composants sont acheminés vers le bulbe pour être réutilisés.
L’érythrone est la première plante que le frère Marie-Victorin a identifiée au début de sa carrière de botaniste. Les colons la nommaient ail doux à cause de la similitude de la forme de ses feuilles avec celles de l’ail des bois, mais, contrairement à cette dernière, son bulbe n’a pas le goût d’ail.
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